Santiago Cordero Marin
(synthèse de deux articles parus dans le Libre Journal N° 264 du 24 avril 2002)
Qui aurait cru qu’en 2002, dans cette société « surinformée » qui est la nôtre, un homme aussi public et depuis aussi longtemps que Chirac aurait pu préserver le moindre soupçon d’obscurité, voire de simple intimité ? Et c’est pourtant le cas. Acharnement de l’intéressé à dissimuler ou incuriosité de médias prudents, le fait est là : il existe, dans la vie de Chirac, un secret central. Un secret de famille.
On pourrait dire qu’il y a de l’indécence à forcer les ultimes secrets d’un homme, fût-il politicien, c’est-à-dire, en somme, livré par sa propre volonté aux pires indiscrétions. C’est vrai. Mais de tels scrupules ne sont pas de mise, s’agissant d’un fardeau qui livre un homme, pieds et poings liés, à tous les chantages, à toutes les pressions, à tous les caprices de lobbies qui, d’un mot, peuvent briser une carrière, une réputation, une vie. Comme naguère Marchais fut tenu par ses mensonges sur son passé de travailleur volontaire au service du Reich national-socialiste, Chirac est aujourd’hui prisonnier de ses dissimulations sur ses origines.
Sur Chirac, la vérité reste encore ignorée par l’immense majorité des Français, parce que les deux ouvrages qui l’ont révélée ont été, l’un étouffé par le bâillon médiatique, l’autre purement et simplement retiré de la circulation. Le premier ouvrage est disponible, mais aucun média n’en a parlé hors du cercle restreint de la droite nationale. C’est le très remarquable pavé d’Henri de Fersan, « L’Imposture antiraciste ». Dans ce livre, Fersan rapporte une révélation confirmée par plusieurs journaux étrangers, mais jamais reprise en Espagne hors des cercles nationalistes : Chirac « n’est pas le fil d’Abel et de Marie-Louise Chirac. Il n’est pas né le 29 novembre 1932 à Paris… La réalité a été révélée en 1975 par la Gazeta Ilustrada, une revue madrilène : Jacques Chirac s’appelle en réalité Santiago Cordero Marin, il est né le 6 septembre 1934 dans le village d’Albana, dans la province des Asturies, en Espagne. » Et Fersan voit dans cette appartenance de Chirac à une famille de révolutionnaires juifs des Asturies le ressort de sa décision extravagante attribuant la carte d’ancien combattant aux anciens tueurs communistes des Brigades Internationales.
Fantasmes sans fondement, dira-t-on. Eh bien, il suffit de lire l’autre livre sur le passé interdit de Chirac pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’une hypothèse délirante. Ce livre, « Les vertes années d’un Président », propose, présentés par son fils, de larges extraits du journal de Marguerite Basset, qui fut la meilleure amie de Louise Chirac, née Valette, mère de Jacques. On y apprend que Chirac ne peut pas être le fils de François et Marie-Louise Chirac pour une raison médicalement incontournable : Marie-Louise, après une première grossesse pathologique dont le fruit, une fillette, ne vécut pas, avait subi une ligature des trompes. Cet acte chirurgical irréversible entraîne une stérilité définitive. On y apprend aussi que le père de Jacques changea en François son vrai prénom, qui était Abel et dont la tonalité juive risquait de gêner ses bonnes relations commerciales avec les Allemands pendant l’Occupation. Ce livre, publié aux Éditions Filipacchi, fut immédiatement retiré des librairies. Il est épuisé et introuvable. Imagine-t-on le pouvoir que détiendrait un lobby disposant de la preuve (actes officiels, photographies, voire déclaration signée) que le Président de la République Française n’est français que par fausse déclaration à l’état civil de ses parents adoptifs ?
Vengeance trotskiste
En refusant la consigne de voter Chirac pour « faire barrage à Le Pen », les trotskistes Laguiller et Besancenot confirment ce que les socialistes disaient en privé depuis quelques semaines : ce sont ses anciens camarades qui ont eu la peau de Jospin. Une vengeance bien dans la manière de ces groupuscules sectaires, qui n’hésitent jamais à liquider un « social-traître ».
Aveu forcé
Jospin a longtemps soutenu que son alias « le camarade Michel » - dont se souvenaient les anciens de l’Organisation Communiste Internationaliste (OCI) dirigée par Pierre Boussel dit Lambert – était non pas lui mais son frère aîné. Si, finalement, le 2 juin, il finit par avouer son mensonge devant l’Assemblée nationale et reconnaître son appartenance à l’OCI alors qu’aucune preuve écrite de cette appartenance n’existait, c’est parce que son ancien chef avait confirmé personnellement l’information à Chirac. Jospin savait donc qu’en continuant à nier, il n’aurait fait qu’écorner plus encore son image.
Balance
Le lien entre les trotskistes et Chirac est passé par Maurice Ulrich, très étrange diplomate gaullard devenu directeur de cabinet de Chirac pendant la première cohabitation. Sa propre fille, Michèle, militait à l’OCI sous le « blaze » de Sonia. Elle était la compagne du sinistre Malapa, chef peu regretté des bandes armées du groupuscule. C’est elle qui organisa, chez Ulrich, le dîner entre son gourou, le vieux Boussel-Lambert, et Chirac en personne, en présence du syndicaliste FO Marc Blondel, franc-maçon et lui aussi ex( ?)militant trotskiste.
Rumeurs
Après ce dîner, Chirac, pourvu d’un dossier complet, chargea Patrick Ollier, député RPR des Alpes-Maritimes, de mener la campagne de rumeurs sur le passé de Jospin, afin « d’appuyer là où ça fait mal » et de casser l’image de modéré du Premier ministre. Mesurant le danger, Jospin avoua alors enfin son appartenance passée, croyant ainsi priver le RPR d’une arme précieuse.
Le dossier Robert
Mais Chirac avait une réserve : le « dossier Robert ». Robert, le père de Jospin. Pacifiste, collaborationniste, Robert Jospin avait, le 5 juin 1944, accepté de Vichy la charge de conseiller municipal au Logement de la commune de Meudon, où le maire juif avait été révoqué. Arrêté, le 23 août 1944, par le Comité de Libération de la ville comme tous les conseillers municipaux nommés, sans vote, par Vichy, il avait été exclu de la SFIO pour « attitude trouble » pendant l’Occupation.
Collabo
Disciple de Félicien Challaye qui, dès 1933, appelait à « une paix désarmée, même en face de Hitler », Robert Jospin, fondateur en 1936 de la Ligue Internationale des Combattants de la Paix (LICP), dont le mot d’ordre était « Plutôt la servitude que la guerre ! », était membre de la Ligue de la pensée française de René Château, dont le journal, La France Socialiste, défendait en 1942 la « collaboration de gauche ». Ami intime de René Dumont, futur parrain politique et parrain des écolos et rédacteur à La Paix de Montargis, qui prônait la déportation des Juifs en Palestine, il avait adhéré au RNP de Déat et patronné, aux côtés de Claude Jamet, père du journaliste Dominique Jamet, le journal de la gauche collaborationniste Germinal. Enfin, au printemps 1942, il avait rédigé une déclaration sur la réconciliation européenne et l’amitié franco-allemande. Qualifier ces engagements de « pacifisme égaré » était un aimable euphémisme.
La loi de la barbichette
Devant la menace de ce dossier, un gentleman’s (sic) agreement fut donc passé entre les deux « principaux candidats ». Les socialistes ne parleraient pas des affaires (Arnaud Montebourg, député socialiste et contempteur de « Chirac le menteur, Chirac le voleur » fut prié de la fermer). Et en vertu de la loi de la barbichette (« Je te tiens, tu me tiens »), les chiraquiens oublieraient Papa Jospin. Hélas, les trotskistes ne se sentirent pas tenus par ce bel accord. Et Lambert sortit de la clandestinité pour donner à L’Express une interview annonçant qu’il allait publier des documents explosifs sur son disciple dans un livre à paraître avant la présidentielle. Curieuse manie de la délation, chez ce vieillard qui, déjà, pendant la « drôle de guerre », arrêté pour avoir distribué des tracts défaitistes, fut liBernys – dit-on – après avoir livré les noms de ses complices.
Pourrisseur
Autre « balance » : le vieux maître à penser de Jospin, Boris Fraenkel, qui livra à son tour les secrets de son ancien protégé. Né à Dantzig, l’actuelle Gdansk, ancienne ville libre polonaise incrustée dans l’Allemagne d’avant 1939, militant sioniste d’extrême gauche, membre de l’Hachomer Altzaïr, organisation de fanatiques sionistes et marxistes, Fraenkel fut l’un des agents de corruption les plus efficaces de la société française des années soixante. Adepte du freudo-marxisme, disciple de Wilhelm Reich, c’est lui qui popularisa en France les thèses du prophète de la libération sexuelle, Herbert Marcuse, dans la jeunesse soixante-huitarde. Lorsque Jospin adhéra au trotskisme « lambertiste », Boussel fit de Fraenkel le « précepteur » exclusif du jeune énarque qui, seul de son cas, bénéficia d’une formation individuelle. Jospin est véritablement le fils spirituel de Boris Fraenkel.
Entrisme
C’est ce Fraenkel qui enfonça Jospin. « Nous n’avions pas d’énarque, alors, dans le mouvement, confia-t-il au Monde. C’était une chance extraordinaire de pénétrer la haute fonction publique. Je me souviens en avoir parlé à Lambert. Nous avons été d’accord pour que Lionel suive son GER (Groupe d’études révolutionnaires) tout seul, pas en groupe comme on faisait d’habitude. J’étais le seul à avoir des contacts avec lui. C’était un enseignement individuel, afin de le protéger. »
Arlette, on t’aime !
Restait à saboter la campagne du renégat. Ce fut fait avec les trois candidats trotskistes, qui totalisaient 10,61% des suffrages. Dix fois plus qu’il n’en aurait fallu à leur ancien camarade pour être au second tour… Arlette, on t’aime !